Parce que cet évènement n’a lieu qu’une fois par an et parce qu’il nous tient particulièrement à coeur, nous avons voulu en savoir plus sur les coulisses de la marche à la mémoire de Jordan Bensemhoun Za’l. Nous avons posé nos question à Ory, responsable éducative des programmes MASSA certifiés de l’Expérience Israélienne, et Yehuda Salama, directeur du programme de préparation à Tsahal, Gour Arié, à l’initiative de cette exceptionnelle randonnée du souvenir. En compagnie de la famille de Jordan – sa mère notamment, de ses proches et de dizaines d’anonymes.
L’opération “Marchons pour Jordan”, c’est quoi exactement ?
On sent que Yehuda aime particulièrement cette marche hautement symbolique. Il nous explique que, dans le cadre de son programme de préparation à l’armée Gour Arié, il voulait faire participer ses jeunes à un “ty’oul” dans l’esprit de celui que font les soldats lorsqu’il reçoivent leur béret. Mais pas sans donner un sens plus profond. “Nous avons voulu donner une valeur à cette marche. Alors avec Arié Abitbol (directeur de la section européenne des programmes Massa longue durée à l’Expérience Israélienne) qui connaissait la famille de Jordan, on a voulu lui dédier cette marche parce qu’il ressemble à tous ces jeunes qui font Gour Arié, et qui veulent intégrer Tsahal.
Ory, (directrice des programmes Massa affiliés à l’Expérience Israélienne) a un lien aussi très fort avec cet évènement. Si elle s’amuse du fait que l’ « on ait un tout petit pays que l’on peut parcourir d’ouest en est en 4 jours ! », ce ty’oul représente aussi quelque chose de spécial. « Il est très fréquent en Israël de voir des initiatives de ce type pour commémorer la perte d’un être cher, en particulier lorsqu’il s’agit d’un soldat. Les Israéliens ont pour habitude de faire des marches, en souvenir d’un soldat tombé pour la défense du pays. Tout simplement parce que la Marche permet la communion avec la nature, le souvenir individuel et collectif.
A l’image de la marche pour le bêret; revenir à l’essentiel pour mieux se souvenir de Jordan.
Et aussi parce que comme l’a dit Yéhuda, dans la préparation des combattants il y a une étape essentielle : le massa koumta, la Marche pour le béret; une longue marche de 70 km en moyenne, dont le but est de repousser ses limites physiques et mentales face au froid, à la chaleur, à la fatigue, à l’épuisement, même face à la faim parfois. Les apprentis combattants marchent durant des jours sans s’arrêter, sans dormir et sans retirer leur équipement. A la fin de ce voyage, leurs commandants leur remettent le béret de leur unité, grand symbole de fierté et d’appartenance au groupe.
Ici, il s’agit davantage de tourisme mais les conditions de ce massa mi yam el yam ( d’une mer à l’autre ) sont assez élémentaires : on marche toute la journée, nos repas sont faits de pique-niques simples, on dort à la belle étoile à même le sol, sans tente. Revenir à l’essentiel pour mieux se souvenir de Jordan.
Pourquoi dédier cette randonnée à Jordan Bensemhoun Za’l ?
Lorsqu’on lui pose la question, Ory répond du tac au tac: « Yehuda voulait donner du sens à ce dernier tyoul de l’année, celui qui clôture leur programme de préparation militaire de 8 mois. Il s’est dit pourquoi ne pas dédier la Marche à un « Hayal Boded », un soldat sans famille en Israël, tombé pour la défense de l’Etat. Le nom de Jordan Bensemhoun z’l s’est imposé assez naturellement : c’est un Lyonnais, comme les jeunes de Gour Arié, il a fait une Préparation à l’armée au sein d’une Mehina Kdam Tsvait, puis a intégré l’unité d’élite des Golani, l’unité Egoz. A l’été 2014, il perd la vie au combat lors de l’opération Tsouk Eytan, nous étions en Israël et avions suivi son enterrement, la foule qui s’y était déplacée, famille et anonymes, pour lui témoigner un dernier hommage.
Jordan, un symbole pour les jeunes Gour Arié
Jordan est pour les jeunes un symbole de courage, d’abnégation, d’engagement et de sionisme et ce sont ces valeurs que cette randonnée a pour vocation de leur inculquer. » et Yéhuda d’ajouter que «en Israël, quand il y a des jeunes soldats qui décèdent, on fait beaucoup de marches, de manifestations etc.. Quand un soldat vient seul, il n’y a rien du tout. Alors nous avons prit un jeune français auxquels les jeunes peuvent s’identifier afin qu’ils puissent continuer ce qu’il a commencé”.
Quelle est l’atmosphère de cette randonnée souvenir ?
« Baroukh Hachem, il y a une bonne ambiance ! n’hésite pas à s’écrier Yehuda. Cette année il y avait la famille de Jordan Bensemhoun au grand complet ! c’était quelque chose de fou. Mais même si on s’amuse et on rigole, on est là aussi pour parler, se rappeler la mémoire de Jordan par le biais des histoires que sa mère racontait. Et de son coté, elle a aussi voulu savoir comment ces jeunes vivent cette Méhina (préparation) au service militaire israélien et ce qu’ils ont vécu pendant cette année parce que son fils à fait le même parcours. Tout cela à donné de la valeur à ce ty’oul et l’idée était perpétuer le souvenirs de Jordan à travers ses qualités. »
« Commémoration ne veut pas dire tristesse ! » ajouta Ory !
Comment la famille de Jordan a-t-elle vécu cette marche ?
« La participation de toute la famille de Jordan a donné cette année une dimension totalement différente à cette randonnée. Ils ont parlé de leur fils, cousin, neveu, en racontant des histoires, en décrivant ses traits de caractères, en essayant de comprendre ce qu’il avait en commun avec les jeunes de Gour Arié. Malgré l’émotion palpable, la maman de Jordan a toujours conservé une attitude profondément digne et positive. Elle a maintes fois répété ses encouragements aux participants du programme, en leur disant de réaliser leurs rêves et de réussir comme Jordan l’avait fait avant eux. »
De son coté Yehuda qui ne connait pas de la même manière la famille de Jordan, a quand même pu sentir quelque chose de spécial se créer avec eux: ” Moi j’ai vraiment senti un manque à la fin du ty’oul. Nous étions tous ensemble tout ce temps, très unis. Nous avons marché ensemble, nous avons ri ensemble, nous avons même cuisiné ensemble tous les soirs ! La tante de Jordan m’a dit qu’elle aimerait vraiment recommencer ce ty’oul tous les ans tant qu’elle le pouvait . Alors je pense que la famille a vraiment vécu quelque chose durant ce ty’oul“
Comment les jeunes du programme Massa Gour Arié appréhendent t-il cette excursion, en tant que futurs soldats de Tsahal ?
« Je pense qu’ils ne s’attendaient pas à autant d’intensité émotionnelle ! nous dit Ory. Ils sortent deux mois en immersion dans un programme de préparation à Tsahal qui les met en condition de réels soldats israéliens. Ils ont ainsi pu se confronter à la réalité du terrain. Ils avaient également besoin de tester leurs limites physiques et c’est pourquoi cette randonnée arrive à point nommé à la fin de leur programme, telle une cerise sur le gâteau. Ils ont traversé le pays avec beaucoup d’entrain, de rythme et de courage. Ont su apprécier la beauté du paysage et écouter les histoires de la famille de Jordan comme autant d’enseignements précieux. Ils s’y sont identifiés et espèrent arriver au niveau d’engagement et de courage de ce soldat exemplaire. »
2 jeunes de Gour Arié ont intégré Egoz, l’unité de Jordan, suite à la marche de l’année dernière
Yehuda, en tant que directeur de programme de conclure que « Pour eux ce ty’oul c’est aussi la fin de leur programme et un résumé de leur année. C’est un moment très fort, mais aussi une façon se surpasser et de se prouver qu’ils peuvent le faire. C’est porter de l’eau, c’est cuisiner le soir dans la nature, c’est aider les autres. C’est un bonne préparation à l’armée israélienne.
Quant à Jordan, je pense qu’ils ont tiré beaucoup de choses de lui. L’année dernière deux jeunes qui ont fait cette marche sont entrés dans l’unité Egoz, celle ou était Jordan. C’est une façon pour eux de continuer son chemin »
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